L’Armagnac est une fameuse eau-de-vie de vin célèbre dans le monde entier. Née il y a 700 ans, elle est la plus ancienne eau-de-vie de France, mais également la plus appréciée en raison de sa typicité absolument unique au monde. Elle relève d’un savoir-faire séculaire traditionnel réservé à quelques initiés et transmis de génération en génération. Le procédé de fabrication se divise pratiquement en 3 phases : la vinification, la distillation et le vieillissement. Chaque étape est opérée avec le plus grand soin pour obtenir un Armagnac authentique, véritable patrimoine de la Gascogne.
L’Armagnac, empreinte d’histoire
On peut considérer que l’on doit l’Armagnac tel que nous le connaissons aujourd’hui grâce à 3 civilisations. D’abord, les Romains qui occupèrent longtemps l’Aremonique, terre conquise du sud-ouest de l’ancienne Gaule. Leur ferveur pour la vigne et la viticulture ont permis aux ceps de vigne de se déployer sur les nombreuses collines de la région gasconne. Le nom Armagnac trouverait également son origine du latin Arminius, le domaine d’Arminius désignant un fief, une propriété de renom. Le peuple du Moyen-Orient a joué un rôle fondamental dans l’avenir de l’Armagnac : les peuplades venues de la frontière pyrénéenne vers l’an 600, vont importer l’alambic et leur précieux savoir sur la distillation. Enfin, nous devons l’Armagnac aux Celtes, à l’origine des fûts utilisés pour conserver leurs denrées.
La fabrication de l’Armagnac, une tradition gasconne séculaire
D’abord fabriquée dans les monastères, la fameuse « aygue ardente » est à cette époque une eau médicinale réputée pour ses 40 vertus. Ce remède miracle ne tarde pas à franchir les murs des monastères et à s’instaurer dans le quotidien des Gascons. C’est au XVIIe siècle que le commerce d’Armagnac connaît un essor considérable : de gros volumes sont acheminés vers la Hollande, où elle est consommée « mouillée ». Le XVIIIe siècle voit naître la distillation à premier jet continu, qui marquera un tournant dans l’histoire de l’Armagnac. C’est également à cette époque que le titre de « bouilleur de cru » fait son apparition, tout comme la notion de crus. En pleine expansion, le commerce d’Armagnac est mis à mal par les catastrophes naturelles qui se succédèrent vers la fin du XIXe siècle : des 100 000 hectares de vigne, un quart seulement subsiste aujourd’hui.
Découvrir avec quoi est fait l’Armagnac
Pour savoir avec quoi est fait l’Armagnac, il faut admirer le paysage qui décore sa région : des rangs de vigne à perte de vue arborant les collines arrondies de la Gascogne. La première étape dans la fabrication d’Armagnac est la vinification d’un vin blanc. Pour cela, le raisin blanc issu de 10 cépages autorisés est récolté, puis pressé afin de ne garder que le moût qui sera ensuite vinifié en blanc. Les parcelles dédiées à l’élaboration d’Armagnac doivent faire l’objet d’une déclaration préalable. La vinification doit être la plus traditionnelle possible, sans adjonction de soufre ou de sucre (chaptalisation). Au terme du processus, on obtient un blanc de blanc, avec une bonne acidité et un faible degré alcoolique, deux indicateurs essentiels qui laissent présager de la qualité de la future eau-de-vie. La fermentation doit être la plus courte possible, et le vin devra être distillé le plus tôt possible, dans tous les cas avant le 31 mars de l’année suivante.
Découvrir la distillation de l’Armagnac
La distillation est un procédé de séparation de substances liquides totalement miscibles et repose sur la différence de la volatilité des matières. Son invention remonterait au IIe siècle avant J.C, précisément à Babylone, où les plus anciennes ébauches d’alambics ont été retrouvées. Elle est notamment utilisée dans la parfumerie, le domaine médicinal ou encore dans l’industrie pétrochimique. De nombreux alcools sont en réalité des distillats de plantes ou de fruits, comme le Cognac, le Calvados, le rhum ou encore la vodka ou le kirsch.
On distingue deux procédés pour la distillation de l’Armagnac. La distillation armagacaise, dite traditionnelle, utilise un alambic à premier jet continu. Cette méthode est utilisée pour 95 % de la production, car elle permet d’obtenir les eaux de vies les plus onctueuses et les plus capiteuses. On l’appelle la distillation Per Descensum, ou distillation à colonne fragmentée. La distillation cognaçaise fut interdite pendant la Seconde Guerre Mondiale, avant d’être de nouveau autorisée en 1972. Cette méthode est dite « à double chauffe », car elle nécessite deux distillations successives. On l’appelle distillation Per Ascensum, et bien qu’extrêmement confidentielle, elle donne naissance à des eaux-de-vie d’une finesse incomparable.
Au sortir de l’alambic, la fameuse « coulée d’argent » coule en goutte à goutte directement dans le contenant en bois destiné à son vieillissement.
Découvrir le vieillissement de l’Armagnac
Le vieillissement est une étape décisive pour les futurs Armagnacs. En effet, le bois et l’eau-de-vie vont communier durant de longues années de maturation, au terme de laquelle l’Armagnac aura gagné sa robe et son caractère définitifs. Pour confectionner les fûts, on utilise du bois de chêne issu des forêts locales. Les douelles sont fendues dans la partie la plus noble de la grume, le merrain, puis entreposées à l’air libre durant plusieurs années avant d’être cintrées en « pièces » contenant aujourd’hui environ 400 litres.
Au fil du temps, les composés hydrolysables du bois vont donner à l’eau-de-vie sa teinte ambrée et révéler ses esprits caractéristiques. Afin de ne pas trop « boiser » les eaux-de-vie, deux années sous bois neufs suffiront, puis les Armagnacs seront mis sous bois plus anciens. Durant la maturation, les vapeurs d’alcool vont s’évaporer pour un volume moyen de 2 à 6 %, communément appelé « la Part des Anges », ce qui lui permet de concentrer sa richesse aromatique.
Au terme du vieillissement, les Armagnacs sont la plupart du temps « mouillés » à l’eau distillée pour titrer 40° GL. Cependant, une maturation extrêmement longue peut permettre d’atteindre un degré alcoolique identique sans adjonction d’eau, mais cela nécessite bien souvent plusieurs décennies, alors que l’Armagnac est souvent commercialisé avant d’atteindre l’âge de 7 ans.
La fabrication de l Armagnac : un processus long et complexe
Avec ses 700 ans d’histoire, l’Armagnac est une eau-de-vie ayant traversé le temps et marqué l’Histoire de sa région. Les premiers Gascons ont rapidement compris comment faire de l’Armagnac un produit unique et très convoité de par le monde. Au fil du temps, le procédé de fabrication de l’Armagnac a considérablement évolué, permettant son essor fulgurant au XVIIIe siècle, notamment grâce à la création de l’alambic à premier jet continu. Cette nouvelle méthode va révolutionner l’Armagnac jusqu’à s’instaurer en tradition et se baptiser distillation armagnacaise.
Le vieillissement joue lui aussi un rôle fondamental dans l’évolution de l’eau-de-vie en Armagnac : son ambré typique, mais surtout sa rondeur et ses esprits uniques. De tout temps, les Gascons ont pris un soin particulier à leurs vignes et leurs forêts de chêne, conscients de la richesse de leur patrimoine et de l’importance de leur pérennité. Malgré les grands progrès technologiques qui auraient pu le dénaturer, l’Armagnac est encore élaboré selon la méthode la plus traditionnelle possible, dans le but de conserver toute son authenticité.